Voyage intra temporel

(English follows)

Le début

Étendue sur la civière poussée par des mains inconnues, je regarde défiler les tuiles du plafond à un rythme rapide et efficace, calqué sur les pas du préposé qui me propulse.

J’ai l’impression d’être dans un film.

Malgré les couvertures chaudes dont on m’a gentiment enveloppée, je frissonne.  C’est qu’il fait très froid au bloc opératoire!  Je me demande pourquoi.  Le genre de questions saugrenues et inutiles qui émergent parfois dans de telles situations.  Est-ce pour minimiser la capacité des bactéries à se développer dans cet endroit où la stérilité est primordiale?  Probablement.  Je ne sais pas mais assurément, pour qu’il fasse si froid, c’est voulu.  Je réalise alors la futilité de mon questionnement et j’abandonne.

On me stationne devant une porte double arborant le numéro 50 en me disant que ça ne sera pas long.  J’attends donc qu’on m’introduise dans ce lieu où seuls les gens malades ont accès.  Pourtant, je ne ressens aucune nervosité.  De la curiosité tout au plus.  C’est comme si j’étais une spectatrice assistant à une scène dont elle ne fait pas partie et qui ne la concerne en rien.  Tout d’un coup je me sens tirée vers l’arrière et j’entre en salle d’op.

C’est une véritable ruche.  Un coup d’œil rapide me permet de voir trois ou quatre « infirmières-ouvrières », vêtues de la tenue réglementaire, qui se préparent. C’est un essaim organisé, efficace et méthodique que je vois évoluer.

Réf.: bees.techno-science.ca
Réf.: bees.techno-science.ca

L’une d’entre elle me sourit et me salue d’une voix qui se veut rassurante.  Je lui retourne son sourire et je lui dis: « Bonjour!  Dites donc, il fait froid chez vous!! ».  Avec un petit rire elle me répond en disant: « Oui c’est vrai… mais nous, nous sommes très chaleureuses! »

J’ai encore ce sentiment d’assister à une scène de film.

Chacune s’affaire avec la rapidité et l’efficacité exemplaire des gens qui savent exactement ce qu’ils font. Rapidement, tout en placotant avec moi comme si on s’installait pour prendre un café ensemble, on me transfère sur la table d’opération.

Commence alors le rituel de préparation.  On me retire mes précieuses couvertures, plaçant mes bras en croix sur des attelles prévues à cet effet.  Je frissonne de la tête aux pieds.  Je précise alors que je ne tremble pas par ce que j’ai peur mais simplement par ce qu’il fait très froid.  On sourit et on me couvre les bras d’une nouvelle couverture chaude.  Simultanément, les infirmières-ouvrières bourdonnent et s’affairent autour de moi. On me badigeonne de gel ici et là, on me parsème d’électrodes.  Je sursaute à chaque fois, c’est glacial!

Je réalise soudain que mon corps ne m’appartient plus.  Livrée à ces mains expertes, j’ai alors le souvenir d’avoir déjà éprouvé ce sentiment lors de mon premier accouchement.  Par contre, cette fois là, c’était un petit être à l’intérieur de moi qui avait pris les commandes.  Lui ainsi que l’instinct animal immuable de la femelle qui met bas.

Le visage masqué d’une femme d’âge mûr se penche sur moi me ramenant brusquement au moment présent. « Je suis Dr Unetelle, l’anesthésiste.  C’est moi qui vais vous endormir. »

Je réponds à ses questions de routine en grimaçant alors que l’aiguille s’enfonce dans mon bras gauche.  Bêtement, je me dis que  j’aurais dû la prévenir que je n’ai jamais eu une bonne veine dans le bras gauche,  elle a toujours été fuyante et rébarbative. Le côté droit aurait été mieux.  Puis, je réalise que, de toute façon, dans quelques minutes, je ne sentirai plus rien.

Le chirurgien arrive, me salue en s’approchant de moi.  Je le questionne sur la durée de ma convalescence, il me répond sur un ton péremptoire qu’il faut un minimum de 3 à 4 semaines.  Il m’informe ensuite qu’il doit vérifier mon identité (!!!) et me pose une liste de questions tout à fait rassurantes.  Mon nom et ma date de naissance, le nom de jeune fille de ma mère et la raison pour laquelle je suis là aujourd’hui.  Je réponds : « ablation de la vésicule biliaire » et du coup… je passe le test!  Et lui aussi par le fait même car je me dis in petto: « Tant mieux, comme ça je peux être sûre qu’on ne m’enlèvera pas le rein gauche par erreur ».

Un autre visage se penche au-dessus de moi me montrant un masque de caoutchouc d’un beige tout ce qu’il y a de plus fadasse.  Une voix douce me dit: « Je vais appliquer ceci sur votre visage.  Ce n’est que de l’oxygène.  Prenez de grandes inspirations, cela va vous aider à vous endormir. »  Confiante, j’acquiesce d’un signe de tête.

Le masque descend vers-moi.  Je sens son odeur aseptisée, stérile aussi insipide que sa couleur. J’obéis à la commande reçue.  Une grande inspiration, deux… Je m’endors.

J’ai 54 ans.

Intermède

« Mme Trudelle!  Mme Trudelle vous m’entendez?  Essayez d’ouvrir les yeux, s’il vous plaît.  Voilà, c’est ça.  Comment vous sentez-vous? ».  Une voix d’homme, ferme et autoritaire, s’adresse à moi.

Je sais pertinemment où je suis.  Je viens de me réveiller suite à ma chirurgie.  Soucieuse de coopérer,  j’essaie d’ouvrir les yeux et de répondre.

Aussitôt, je suis propulsée au creux d’une valse endiablée, où tout virevolte et tournoie autour de moi.  Sonnée et étourdie, je referme précipitamment les yeux en répondant toutefois aux questions qu’on me pose: « Sur une échelle de 0 à 10 comment est votre douleur? »  Je tente de remuer faiblement.  Aïe, il ne vaut mieux pas…  « Si je ne bouge pas, 3 ou 4. »

J’essaie de voir l’heure.  L’horloge, toutefois, ne semble pas consciente du fait qu’elle est une horloge MURALE et qu’elle n’est pas sensée bouger dans tous les sens!!   J’insiste encore et je crois voir au passage que la petite aiguille est axée sur le 2.

Réf.: viewbug.com, Infinity o'clock by Garysanchez
Réf.: viewbug.com, Infinity o’clock by Garysanchez

J’estime alors avoir fait preuve de bonne foi et dès que possible, je retourne vers ce sommeil artificiel si facilement accessible et délicieusement profond, un luxe rare pour une fille qui a le sommeil léger comme moi!

Je réalise plus tard que je meurs de soif et je demande une gorgée d’eau mais cette requête m’est maintes fois refusée.  Après avoir essuyé quelques-uns de ces revers, frustrée, je regarde mon infirmier et lui dit d’une voix enfantine et plaintive: (heu c’est moi qui parle comme ça???) «Vous êtes donc bien sévère avec moi!! Je veux juste une mini gorgée!!!»  Il sourit avec l’air d’un gars conscient de son pouvoir.

Sporadiquement, mon bourreau se manifeste, exigeant de moi des réponses toujours plus pressantes, plus précises.  Il m’énerve!  Ces épisodes désagréables sont entrecoupés de ce sommeil abyssal et délectable.  Entendant une nouvelle fois la sempiternelle question, je réponds impatiente: « Trois ou quatre, je vous l’ai dit tout à l’heure! » avant de me rendre compte que mon geôlier à reporté son joug vers ma voisine d’à côté et que c’est à elle qu’il parle!  Elle a une douleur à la poitrine, la pauvre.  Il demande qu’on lui apporte une machine pour procéder à un électrocardiogramme.

De mon côté, à intervalles réguliers, je sens le manchon du tensiomètre me serrer le bras droit, puis relâcher.

Tout ce que je souhaite, c’est qu’on me laisse dormir donc je suis sage comme une image afin d’éviter d’attirer l’attention sur moi. Je me sens comme lorsque, toute jeune, j’essayais très fort de me faire oublier, ne pipant mot, respirant à peine, espérant que ma sœur Hélène oublierait de m’envoyer au lit et que je réussirais à écouter « Rue des Pignons » au complet!  À la différence que cette fois, c’est au sommeil que j’aspire.

Tout au long de l’après-midi, au fil des moments d’éveil que l’on exige de moi, je concentre le peu d’énergie que j’ai à tenter d’apprivoiser l’horloge qui refuse toujours d’obtempérer.  Ce n’est qu’à 16h45 que, fière de moi, j’arriverai finalement à la dompter et à lire l’heure pour la première fois!  Je commencerai bientôt à réaliser que cela fait très longtemps que je suis là!  Est-ce que je ne devais pas retourner en chirurgie d’un jour vers 14h30? Mais, très vite, le sommeil reprend le dessus et la question demeure sans réponse.

Je finirai par apprendre que j’ai mal réagi à l’anesthésie.  Mon bourreau, qui est syndiqué et qui s’apprête à partir en pause, me confie aux soins d’une collègue et lui explique que « Mme Trudelle nous a fait une baisse de pression.  Elle était à 40 sur « je ne me souviens plus combien ».  Finalement, on a dû lui injecter du « je ne suis plus quoi » afin d’accélérer son rythme cardiaque.  On a eu de la difficulté à la stabiliser.  C’est pour ça qu’elle est encore ici.  Mais, on est sur la bonne voie, je crois.»

Ma nouvelle gardienne s’installe, assise entre mon lit et celui de ma voisine, toute son attention nous étant réservée et dévouée.  Je réussirai finalement à obtenir d’elle cette petite gorgée d’eau si convoitée.  Par souci d’honnêteté toutefois, et pour lui éviter de s’attirer des ennuis, je lui avoue « que l’autre monsieur, lui, ne voulait pas m’en donner! »  Elle me sourit et me répond: « On ne le lui dira pas ».

Je souris alors, enchantée de jouer un si mauvais tour à mon bourreau.  Je m’empresserai toutefois, dès son retour, de l’informer d’une petite voix impertinente: « Haha!  J’ai eu de l’eau finalement! »  Et lui de me répondre avec un petit sourire un tantinet condescendant.

Peu après, il m’annonce que je vais finalement être redescendue en chirurgie d’un jour.  Magnanimes tous les deux, nous oublions nos différends et nous serrons la main.  Je me souviens lui avoir dit: « Merci!  Sans rancune, hein!  Je ne vous en voudrai pas. »  Sur quoi, il se met à rire franchement et me répond: « J’espère bien que non! »

C’est seulement à ce moment-là, à la lumière de ce sourire, que je me rends compte de deux choses.  Primo: sa mine renfrognée de tout à l’heure n’était probablement due qu’au souci qu’il se faisait au sujet de ma personne.  Secundo, j’ai réalisé que c’était un bien beau jeune homme!  Mais, je n’ai rien vu de tout ça.

Tout l’après-midi, je n’avais que 8 ans!

Retour vers le futur

Finalement, on m’a retournée au département de chirurgie d’un jour vers 17h45.  J’étais mortifiée à l’idée que mon chum m’ait attendu toute la journée.

Nous étions une belle gang d’éclopés a tenter de nous remettre du match inégal que représente une rencontre avec une anesthésie générale.  En effet, elle nous fait payer très cher ces moments où la douleur ne peut nous atteindre.  Grâce à mon bourreau qui refusait d’étancher ma soif, je n’ai pas eu à souffrir de nausées, heureusement!  Je ne vois pas comment les quatre petites, mais bien présentes, incisions sur mon abdomen m’auraient permis d’endurer ça!!

Je vous épargne les détails de ce séjour forcé que je serais heureuse d’oublier.  Disons seulement que la durée de celui-ci dépendait de deux choses.  Je devais obligatoirement réussir mon premier lever, marcher un peu et soumettre un échantillon de 150 millilitres de pipi pour pouvoir être libérée.  Le temps alloué pour ce faire était limité car le département fermait ses portes à 22hrs!  Afin de m’aider à accomplir ce mini tour de force, j’héritai des services d’une « entraîneuse personnelle » qui était aussi infirmière.  Force m’est d’admettre qu’elle était d’une gentillesse irréprochable.  Ceci est, bien sûr, de loin préférable que de tomber sur une harpie désagréable.  J’ouvre une parenthèse ici demandant que toutes les infirmières de ce monde me pardonnent d’avance la sortie que je m’autoriserai à faire ici.  Je vous adore et il y bien peu de métiers en ce monde que je respecte plus que le vôtre!

Toutefois, je dois admettre que son enthousiasme débordant, sa volonté de nous aider et nous encourager combinée à sa personnalité de «cheerleader» devinrent à mes yeux rapidement presque insupportables.  Quand tu ne te sens vraiment pas bien, que tu DOIS te lever et marcher et que tu es la CINQUIÈME personne à qui elle dit: « Surtout ne regardez pas le plancher car je vous jure que vous allez le « frencher » si vous faites ça! » eh bien, disons que sa petite farce qui sent le réchauffé… tu n’as pas trop envie de l’entendre!  Ajoutez à ça un manque total de discrétion qui se traduisait par cette façon qu’elle avait d’afficher les « succès et défaites » de ses protégés.  Tout le monde savait par exemple que le jeune hipster barbu n’arrivait pas à faire son pipi et que faute de quoi, on allait devoir lui mettre une sonde!  Et que ma voisine avait mal au cœur.  Elle a même poussé la note jusqu’à décider de faire de nos performances un CONCOURS!  Qui serait le premier à réussir et ainsi accéder à la porte de sortie?  J’avais l’impression d’être débarquée dans une de ces foutues téléréalités!

Je jure sur la tête de mes deux fils qu’elle a littéralement sauté dans les airs et exécuté ni plus ni moins qu’un ban de meneuse de claques en bonne et due forme lorsqu’elle a reçu son premier pipi!!!  «Super! Bravo ma championne!»  Manquait juste les pompons!

Réf.: someecards.com
Réf.: someecards.com

Voyant mon niveau d’impatience monter dangereusement, mon amoureux a dû faire preuve de beaucoup de diplomatie et de patience afin d’éviter que je n’éclate à la prochaine blague douteuse!  Il me surveillait, me parlait d’une voix douce, comme on s’adresse à un cheval rétif qui veut ruer dans les brancards et me répétait doucement, régulièrement: « Allons France, elle est quand même très, très gentille. Chuuut! »

Une chance qu’il était là.   Merci mon amour!

L’enthousiasme indéfectible de mon entraîneuse aura toutefois eut le mérite de réussir à me galvaniser!  Je n’avais plus qu’une idée en tête : arriver à me lever, me rendre à la salle de bain, lui remettre mon 150 ml de cet or liquide qui, je le savais, la rendrais si heureuse et foutre le camp au plus sacrant!  Je devais toutefois attendre que ma pression soit définitivement stabilisée et que mon infirmière soit disponible.

Je vis ma voisine réussir à faire quelques pas chancelants et incertains.  Elle se déplaçait comme une très vieille femme, tremblante et voûtée, les traits crispés par la douleur.

Mon tour finalement arrivé, aidée de mon amoureux, je m’accrochai résolument à lui pour réussir cet exploit qui semble si simple mais que l’on prend trop souvent pour acquis.  Se lever et marcher.  Les yeux rivés aux siens, je m’appuyai sur lui et me levai péniblement.  Surprise par l’intensité de la douleur, c’est à ce moment précis que je compris ce qui m’attendait.  Soudainement je réalisai que j’étais devenue une vieille femme faible, vulnérable et très, très acariâtre.

J’ai 84 ans.

Réinitialisation

Une dizaine de jours plus tard, je récupère tranquillement.  Beaucoup plus lentement en fait que je ne le croyais avant la procédure.  Je comprends maintenant le ton péremptoire du chirurgien lorsqu’il me disait c’est minimum 3 à 4 semaines de convalescence.  Et encore je devrais me compter chanceuse d’avoir été opérée par laparoscopie!  Beaucoup moins invasif qu’une opération normale.  Bon… mon chakra sacré et celui du plexus solaire sont sévèrement massacrés, soit!  Mais, j’ai pris le temps de leur demander pardon de cette intrusion si violente qu’on leur a fait subir et je leur envoie toute mon énergie positive et guérisseuse en faisant de courtes séances de méditation.

J’ai donc tout le temps de réaliser à quel point mon fantasme préopératoire de convalescence peinarde, ponctuée de petites sessions de peinture, était utopique!  En prévision de ce faire j’avais procédé avant mon départ, à la préparation de la toile grand format dont j’avais tellement envie!  La trame noir et blanc est terminée et m’attend, toute prête, depuis mon retour à la maison.  Malheureusement, je suis bien incapable pour l’instant de m’en approcher. Je comprends désormais que le processus créatif demande beaucoup plus d’énergie que je n’en dispose actuellement!

Même la rédaction de ce texte est faite avec l’aide d’une application de type dictaphone qui transforme mes mots en texte écrit et que je corrige ensuite car il serait présentement au-dessus de mes forces de rester assise devant mon ordinateur pour écrire ces lignes.   Tout au plus aurai-je quelques corrections finales à faire au moment de la mise en ligne.  Le tout aura donc été fait alors que je « travaille » étendue sur le sofa, le téléphone à la main.

C’est long une convalescence.  Oui, je me repose et je dors beaucoup pour bien récupérer…  De toute façon, je me fatigue très rapidement.

Mais, je me console en me disant que ce n’est tout de même pas pire pour une femme de 74 ans!!!  😉

Intra temporal traveling

The beginning

Lying on the stretcher pushed by unknown hands, I look at the ceiling tiles scrolling by at a fast, efficient pace, modeled on the steps of the orderly who is propelling me.

It’s like being in a movie.

Despite the hot blankets which were kindly wrapped around me, I shudder.  It’s very cold on the operating floor!  I wonder why. To minimize the ability of bacteria to grow in this place where sterility is paramount perhaps? I don’t know but certainly, for it to be SO cold, it’s sought after for sure!  This is the kind of ridiculous and unnecessary questions that sometimes emerge in such situations.  I realize the futility of it and give up.

The orderly parks my stretcher in front of a double door bearing the number 50. Set aside in the hallway, I wait to be introduced into this place where only sick people have access. Far from overwhelming me this idea makes me smile.  In fact, I feel a little giggly. No nervousness, curious at best.  I feel like a spectator watching a scene she isn’t a part of or concerned with.  Suddenly I am pulled backwards and I enter the OR.

It’s like a beehive. A quick glance allows me to see three or four « workers-nurses » dressed in formal attire as they prepare. It is an organized, efficient and methodical swarm I see evolving.

Réf.: bees.techno-science.ca
Ref.: bees.techno-science.ca

One of them smiles at me and greets me with a warm reassuring voice. I smile back and I say, « Gees, its cold in here!! »  With a chuckle she replies: « Yes it’s true… but we are very warm people… makes up for it! »

Looking around, I still have that feeling of being in a movie scene. Everyone is moving around with speed and the efficiency of people who know exactly what they are doing.

Quickly, while chatting with me gently through the whole process, as though we are about to grab a coffee together, I am transferred on the operating table.

The ritual of preparation begins. My precious blankets are removed and my arms are stretched out on either side in a cross like fashion.  I shiver from head to toe. I blurt out that I am not afraid but just very cold. Magically, a warm blanket is spread across my arms.

Simultaneously, the “worker-nurses” are actively buzzing around me.  I am smeared with conductive gel, covered with electrodes. I jump every time, it’s bloody cold!  I suddenly realize that my body doesn’t belong to me anymore…

Entrusted to these expert hands, I remember another occasion when I experienced that feeling.  The first time I gave birth. Although back then it was a tiny little being inside of me who had taken control. Him and the immutable animal instinct of the female giving birth.

Suddenly, the masked face of a mature woman comes into view… « Hello!  I’m Dr. « Doe », the anesthetist ».  I answer her routine questions grimacing as the needle sinks into my left arm.  I think to myself, stupidly, I should have told her that I have never had a good vein in the left arm, it has always been elusive. The right side would have been better.  I then realize that in a few minutes, I won’t feel a thing anyways.

My surgeon arrives and he greets me as he approaches.  I ask him about the duration of my convalescence, he replies in a rather stern voice that it’s a minimum of 3 to 4 weeks.  He informs me that he has to verify my identity (!!!) and then proceeds in asking many altogether reassuring questions: my name and date of birth, my mother’s maiden name and the reason why I’m here today.  I answer that my gall bladder is to be removed and… I pass the test!  nd so does he, do I tell myself inwardly: « So much the better!  That way I can be sure he will not remove my left kidney by mistake or something. »

Another face leans over me showing me a rubber mask of the dullest beige.  A gentle voice then said: « I’m going to apply this on your face.  It’s only oxygen.  Please, take deep breaths and it will help you fall asleep. »  Confident, I nod.

The mask comes down and covers my nose. I smell it’s sanitized, sterile odor, as bland and insipid as its color. One deep breath, two … I fall asleep.

I am 54 years old.

Interlude

« Ms. Trudelle, Ms. Trudelle, do you hear me? Try to open your eyes, please. There, that’s it.  How are you feeling? » says a firm and somewhat bossy male voice.  I do know where I am.  I just woke up after my surgery.  Anxious to cooperate, I try to open my eyes and respond.

Immediately, I’m propelled amidst a wild waltz, where everything around me twirls and swirls. Just like Dorothy in the Wizard of Oz! Completely dazed, I close my eyes but answer the questions:

« On a scale of 0-10 how is your pain? »  I try to stir slightly. Ouch.  Better not!  « If I don’t try to move, it’s 3 or 4. »

I try to see what time it is.  However, the clock does not seem to be aware of the fact that it is a WALL clock and that it’s not supposed to move in all directions!! I insist and I think I see that the little hand is aiming at the 2.

Réf.: viewbug.com, Infinity o'clock by Garysanchez
Ref.: viewbug.com, Infinity o’clock by Garysanchez

Satisfied that I have shown good faith, I fully intend to return to this artificial yet so easily accessible and delightfully deep sleep.  A rarity and a luxury for a girl who is a light sleeper like me!

I later realize I’m dying of thirst.  I ask for a drink of water but to my dismay this request is repeatedly refused.  After being turned town a few times, I look at my nurse and say in a very childish and plaintive voice (is this really me ???):  « Gees, you are so mean to me!! »  He smiles like a guy who is fully aware of his power.

Sporadically, my « torturer » appears, asking me the same relentless questions, or so it seems.  Gees, could he just let me sleep already???  I know he’s not really bad but he sure he sure is annoying!  These unpleasant episodes are punctuated by abyssal and delectable sleep and, every 10 minutes or so, by the squeeze of the sleeve taking my blood pressure on my right arm.  Upon hearing the pain question again, growing impatient, I answer: « Three or four, I told you!! » before realizing that my jailer switched his yoke onto my next door neighbor. The poor lady has a chest pain.  He asks that someone brings him a machine to do an electrocardiogram.

In order not to attract attention on myself, I’m as quiet as a mouse.  I feel like when I was very young, trying hard to be very quiet, not uttering a word, hardly breathing, hoping my sister Hélène would forget to send me to bed so I could succeed in watching a whole episode of this real grown up show!   Only this time all I’m longing for is sleep!!!

Throughout the afternoon, I concentrate what little energy I have to try to tame the feisty clock.  Slowly but surely, I finally do it! Proud of myself, I can now read the time. … 16:45 p.m.  This is when I start to realize that I have been in the waking room far longer that was originally planned.  Wasn’t I supposed return to day surgery around 14:30?  Sleep washes over me again and my question remains unanswered.

Shortly after, I find out that I actually reacted badly to the anesthetic.  My “tormentor-nurse”, who is about to go on break, is briefing a colleague saying that “Ms. Trudelle had a blood pressure drop. She was 40 over « can’t remember« .  Finally, we had to inject her with « again don’t remember » to speed up her heart rate. We had a hard time stabilizing her. That’s why she’s still here.  But things are looking better now.

My new guardian takes over, sitting between my bed and that of my neighbor.  I finally succeed in getting the much coveted sip of water from her. For honesty’s sake, however, not wanting her to get into trouble, I confess, « the other nurse, he refused to give me some! »  She smiled and replied: « We won’t tell him. »

I smile, enchanted to play such a trick on that nasty man.  I was very happy to inform on his return, in a sassy little voice: « Ha ha! I got some water finally! » He answered me with a smile a tad condescending.

Shortly after, he told me someone was coming to take me down to the day surgery department.  When I left both of us proved ourselves magnanimous and shook hands.  I remember telling him:  « Thank you. No hard feelings!  I won’t hold a grudge”.  Hearing this he laughed out loud and said: « I hope not! »

It is only then, in light of that smile, that I became aware of two things.  First: his earlier frown was probably only due to his concern about my wellbeing!  Second, I realized that he was quite a handsome fellow!!  But I saw nothing of it.

Because all afternoon, I was only 8 years old!

Back to the future

Finally, I returned to the day surgery department at 17:45 mortified at the thought that my poor boyfriend had been waiting for me all day long!

We were a pretty lame bunch attempting to recover from this unfair bout with a general anesthetic.  Indeed, it will make you pay dearly for these blessed moments when the pain cannot reach you.  Thanks to my not so nasty nurse who refused to quench my thirst, I did not suffered from nausea. Considering the four little incisions on my abdomen, I don’t see how I could possibly have endured this!

I’ll spare you the details of this forced stay that I’d be happy to forget. Let’s just say that its duration depended on two things.  I had to succeed in getting up, walking around a bit and submit a sample of 150 milliliters of pee in order to be released. We had limited time to do this because the department was closing its doors at 22:00 hrs!

To assist me with this process I inherited the services of a “personal trainer” who also happens to be a nurse!  I DO have to admit that she was gifted with irreproachable kindness which is, of course, far better than landing on some kind of harpy.  May all the nurses in this world forgive me in advance for the outburst that I will allow myself here. I love you guys and there are few trades in this world I respect more than yours!  Truly!

However, her enthusiasm and eagerness to help encourage us combined with her cheerleader personality quickly became almost unbearable for me.  When you don’t feel well and you HAVE to get up and walk and you’re the fifth person to whom she says: « Make sure you don’t look at the floor now because I swear, if you do you’ll be « frenching » it! ».  Well, let me tell you that this funny little joke is already stale the third time around… and you reallydon’t  want to hear it!  Add to this her total lack of discretion, displaying her protégés successes and failures to the whole « team »! For example, everyone knew the young bearded hipster guy couldn’t pee and that my neighbor kept on throwing up.  Our « coach » even had the brilliant ided to make a contest out of our performances! Who was going to be the winner? It really started to feel like we were in one of these damn reality shows!

I solemny swear on the heads of my two sons that she literally jumped into the air and executed nothing less than a cheerleader’ jump when she was handed her first wee! « Super! » « Bravo my champion! ».  The only thing missing were the PomPoms!

Réf.: someecards.com
Ref.: someecards.com

Seeing my level of impatience rise dangerously, my boyfriend had to use a lot of diplomacy in order to avoid my exploding at the next not so funny joke! He was watching me, talking to me in a soft voice, as if he was trying to soothe a fretting horse and kept telling me gently: « Come on France, she is still very, very nice.  Shhh! »  Good thing he was there!  Thank you my love!

The unrelenting enthusiasm of my “cheerleader/coach” had one good side to it though. I spurred me on to get up, walk to the bathroom, give her the 150 ml of liquid gold she so desperately wanted and… get the hell out as fast as I could!  I had to wait however until my blood pressure was completely back to normal and for my « coach » to be available.

I saw my neighbor take her first faltering, uncertain steps.  She moved like a very old woman, bent, features contorted with pain.  When my turn came, I resolutely clung to my boyfriend in order to accomplish this feat that seems so simple and that we all take for granted:  to get up and start walking.  Eyes riveted to his, I leaned on him and stood up. Surprised by the intensity of the pain, it was at that moment that I fully got a grip of what was awaiting me.  I realized that suddenly I had become this weak, vulnerable and very, very grumpy old woman.

I am 84 years old.

Reboot

A week later, I am slowly improving.  Much slower in fact than I initially thought I would.  I now understand the bossy tone of the surgeon when he told me it will take a minimum of 3 to 4 weeks of convalescence.  And yet, I should consider myself lucky to have been operated by laparoscopy!   It is much less invasive than a normal surgery.  Nevertheless, I have two severely massacred chakras (the sacred one below the navel and the solar plexus) but I took the time to ask their forgiveness for this violent intrusion and through short meditation sessions, I send them all my positive, healing energy.

Meanwhile, I have all the time in the world now to realise just how preposterous my pre-op fantasy of this cushy convalescence punctuated by small painting sessions really was!  Before getting this done, I had prepared this big format canvas I was yearning for.  It’s waiting for me since I got home.  But I haven’t even gone close to it!

I now understand that the creative process demands much more energy than I presently dispose of. Even writing this article is done with the help of a Dictaphone application that turns what I say into text because it is currently above my strength to sit down at my computer to write these lines.  At most, I will have to do a few final corrections.  So, all this « work » was basically done while lying down on the couch, phone in hand.

I comfort myself saying… not sooooo bad for a 74 year old, right?!  😉